DES BONS ET DES MAUVAIS EMPRUNTS - 04/2007

Ne prenez pas l'avion !


Vous devrez sans doute passer par l'aéroport Younik de Zürich (même pour atteindre Genève), vous coltiner avec la publicité charabiesque de la Swissair, acquérir des miles qui n'ont pourtant pas cours en Europe continentale, et finalement vous échauffer auprès de la hotline, avec si peu de chances d'aboutir.

N'empruntez pas le train !


On vous fera embarquer, au bas de la rue du Petit-chêne, à Railcity, lieu grouillant de Railaway, de City-Hit et de City Night Line… Encore combien de temps pour que le glorieux CFF-SBB-FFS, symbole tricolore de la diversité linguistique, ne devienne Souissraïl? Pour rejoindre Renens, je n'en demande pas tant!

Ne prenez pas la route !


Vous serez forcés d'arrêter votre Mobility-Car sharing dans un coffee shop distribuant des breuvages insipides ou des welcome inodores. Est-ce là la "road 66" ou l'autoroute de Morges à Coppet?

N'empruntez pas à votre banque !


Si vous ne le saviez déjà, je vous dirai qu'elle n'aura de cesse vous faire avaler du e-banking, des credit-card, son call-center, ou mieux encore, tout le sabir du package de la maison. Les francs qu'elle prélèvera massivement sur votre compte seront en revanche bien suisses, eux, et les tribunaux dont elle vous menace très fédéraux, et nationalement trilingues.

Au total, n'empruntez pas aveuglément aux langues dominantes !


Avez-vous vérifié les virus qu'elles comportent, et qui vous transmettent la grippe amère, celle qui laisse la glotte triste et le palais déserté. Les intérêts de ces emprunts-là se payent à long terme, et l'on se découvre un jour colonisé!

D'ailleurs, pourquoi se surendetter ?


On ne prête qu'aux riches, certes. Et les suisses sont riches de leurs propres mots, ces capitaux propres qu'ils ne doivent qu'à eux-mêmes. Mais ils peuvent financer seuls leur développement linguistique. Qu'ils soient alémaniques, romands ou  tessinois,  il y a largement de quoi forger les termes, les appellations et les marques qui leur manqueraient. Franchement, il y a plus matière à créer dans un rösti, un papet vaudois ou un grotto que dans un hamburger de nimportoucity !

Que faire en cas d'urgence ?


Il peut arriver, par inadvertance ou lassitude, que l'on emprunte, sans vraiment le faire exprès,
au galimatias des envahisseurs; après tout, qui n'a jamais eu recours à sa carte de crédit pour une petite fantaisie? Il est toujours temps de faire amende honorable par la suite, de consulter son meilleur dictionnaire, ou dans les cas les plus graves ou de récidive, de s'entretenir avec son directeur de conscience. L'important, c'est d'être bien dans sa langue, la maternelle, et de rester lucide sur cet enjeu.  C'est un défi, un challenge (le vieux mot français, pas le tchalinge) chevaleresque, mais ô combien ludique et enrichissant !


Pour terminer, un seul mot face à la déferlante : STOP ! Celui-là est naturalisé depuis plus de trois générations, et il pourra encore longtemps nous éviter de nombreux accidents lexicaux.



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Cliquez ici pour vous abonner à ce flux RSSRéalisation : Dominique TISON
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Dernière mise à jour : dimanche 31 janvier 2021